C’est avec une grande satisfaction que la publication des résultats du programme archéologique maroco-anglais sous le titre de « Volubilis après Rome » est accueillie, et les membres de l’équipe de fouille ainsi que la communauté scientifique ne peuvent que s’en féliciter.
La mission maroco-anglaise, codirigée par Hassan Limane et Elizabeth Fentress, dans le cadre d’une convention de partenariat signée entre l’Institut National des Sciences de l’Archéologie et du Patrimoine du Ministère de la Culture et de la Communication du Maroc et l’University College London du Royaume Uni, a travaillé sur le site de Volubilis entre les années 2000 et 2004. Outre la fouille de deux secteurs B et D dont les résultats constituent l’essentiel de la publication, la mission s’est également intéressée au réexamen de la basilique et de la maison dite de Vénus dans le quartier nord-est ainsi qu’à la mise en valeur de certains aspects du site (restauration des thermes extra-muros, diagnostic de l’état de quelques mosaïques et structures archéologiques, prospections géophysiques de la partie occidentale de la ville, relevé architectural détaillé…).
L’objectif principal du programme était la recherche des niveaux « post-romains », « pré-islamiques » et islamiques de la ville. Pour cela, deux principales aires de fouille, B et D, ont été implantées à l’intérieur de la ville réduite ; la première près des thermes extra-muros datés de la fin du 8eˋme siècle, et la seconde, non loin de la muraille tardive.
Sur la base de l’étude des monuments mis au jour, d’analyses de la stratigraphie, de l’architecture, du matériel archéologique (monnaies, céramiques, verre….) et de l’archéométrie, les auteurs concluent à des occupations de type villageois qui s’échelonnent du 7e au 9e siècles dans le secteur D. Au voisinage des thermes extra-muros, dans le secteur B, on aurait affaire à un quartier nouveau construit à la fin du 8e siècle par une population étrangère à la cité autochtone que les auteurs rattachent à l’arrivée d’Idris Ier. Parmi les constructions de ce quartier, les auteurs de la monographie identifient la demeure volubilitaine du fondateur de la dynastie idrisside.
On savait par les textes que la tribu des Awraba qui occupait Walila avait accueilli Idris 1er et qu’elle l’avait élu imam ; par la numismatique, on savait que la ville frappait monnaie depuis le milieu du 8e siècle et que les premières monnaies idrissides étaient issues des ateliers volubilitains. Mais ce n’est que vers la fin du siècle dernier que l’archéologie a commencé à distinguer quelques monuments attribuables à la première occupation islamique de la ville antique. Aujourd’hui, il est bien établi que l’occupation islamique est très étendue car elle a largement débordé le cadre urbain délimité par la muraille tardive. Par ailleurs, des fouilles récentes ont mis au jour une nécropole islamique à l’intérieur de la ville tardive d’une part, et de nombreuses traces d’occupations à l’extérieur de celle-ci parmi les ruines de la ville romaine ou au-delà des limites urbaines aussi bien romaine que tardive, d’autre part, ce qui laisse à penser que la ville islamique, qui reste à mieux délimiter, était dépourvue de murailles.
Il n’y a pas de doute que cette recherche enrichit notre connaissance de la ville post-romaine de Volubilis et qu’elle ne manquera pas de susciter de nombreuses réactions qui constitueront les bases pour de nouveaux travaux sur la transition entre les périodes antique et médiévale à Volubilis et sur les débuts de l’Islam au Maroc. C’est dans cette perspective d’ailleurs qu’un nouveau programme a été mis en place et débutera avec la parution de cette monographie.