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Abstract
Ce chapitre montre la continuité du rituel à l’égard des Donatistes également. Il présente d’abord l’apport de la documentation canonique en matière de réconciliation des Donatistes, laïcs et clercs, en Afrique aux IVe et Ve siècles. Il souligne ensuite l’apport précieux d’Augustin pour éclairer les principes pneumatologiques qui gouvernaient la réitération de l’imposition des mains associée au don de l’Esprit dans la réconciliation des séparés et des pénitents. Ces principes s’expliquent par une conception de l’effusion de l’Esprit très éloignée du modèle scolastique élaboré à l’époque médiévale : pour l’Église ancienne, la communication de l’Esprit avec ses dons résulte de l’immédiateté d’un agir divin libre et souverain ; elle n’est pas le fruit d’une transmission résultant d’un rite agissant ex opere operato accompli une fois pour toutes. L’imposition des mains, rappellera Augustin, « n’est qu’une prière » ; et d’ailleurs, « on peut la réitérer ». Les rites du culte chrétien ne sont pas considérés comme l’assurance ou la garantie d’un don effectif de l’Esprit. Les usages de l’Église ancienne dans la réconciliation des pénitents montrent comment la perte de l’Esprit par le pécheur conduisait à prier pour une nouvelle initiative de la part de Dieu, consistant en une réédition du don de l’Esprit en faveur du pécheur repenti. Enfin, comme pour les Novatiens, on note aussi qu’aucune onction n’était pratiquée dans la réconciliation des Donatistes : ni en Afrique, ni en Gaule, ni en Hispanie (hormis Barcelone), ni à Rome.
Abstract
Dans ce chapitre, deux catégories d’Ariens sont distinguées : les Ariens de la romanité chrétienne au IVe siècle et les Ariens d’origine germanique. Les sources relatives à la réconciliation des Ariens issus de la romanité chrétienne montrent des modalités d’application du rituel inchangées au IVe siècle. En revanche, les modalités de réconciliation des Ariens d’origine germanique en Gaule, en Hispanie, et en Italie, révèlent une adaptation majeure à leur égard : les Ariens des tribus barbares sont dispensés d’une réconciliation par la pénitence canonique, en vertu de leur statut militaire incompatible avec la réglementation post-pénitentielle (excepté en Afrique). Une onction est par ailleurs pratiquée dans le cadre de leur réconciliation en Gaule et en Hispanie. Cette chrismation est la réitération d’un rite déjà reçu dans les assemblées ariennes. Cette réitération n’est pas conditionnée par des impératifs pneumatologiques, mais résulte de la non-reconnaissance en amont du clergé arien germanique qui a confectionné le chrême de cette chrismation – cette non-reconnaissance ayant entraîné la nullité du chrême arien et donc des chrismations accomplies avec ce chrême. On observe toutefois des pratiques différentes en Italie et en Afrique, où aucune chrismation n’a été mise en œuvre dans la réconciliation des Ariens germaniques. En Italie cependant, la dimension christologique de la chrismation postbaptismale, et ses enjeux en contexte arien, ont poussé certains milieux cléricaux à revendiquer la nullité des chrismations ariennes – en vain semble-t-il –, malgré une reconnaissance du clergé arien dans cette partie de l’Europe. Enfin, les dernières sections de ce chapitre énumèrent les différents documents romains produits jusqu’à Grégoire le Grand, relatifs à la réconciliation des Ariens germaniques, des Nestoriens, et des Monophysites. Cette documentation témoigne d’une évolution dans la réconciliation des séparés. La grande Église a reconnu à des séparés, des Nestoriens et des Monophysites, la possibilité de recevoir l’Esprit dans la séparation. À la même époque, des juridictions occidentales vont même jusqu’à reconnaître la possession de l’Esprit à certains Novatiens et Donatistes. Enfin, on observe un autre type d’évolution dans la discipline pénitentielle à l’intérieur des frontières de la catholicité. Cette évolution intervient au niveau de la perception de la gravité des péchés qui auparavant entraînaient une perte ou une non-possession de l’Esprit. Les critères d’évaluation ne sont plus les mêmes qu’au IIIe siècle pour dire qu’un pécheur possède ou ne possède pas l’Esprit. La non-possession et la perte de l’Esprit vont peu à peu ne plus concerner que les cas les plus extrêmes, mais les critères d’évaluation varient encore jusqu’à l’époque mérovingienne, selon les juridictions ecclésiales en Europe et en Afrique.
Abstract
Les documents relatifs à la réconciliation des Novatiens ont engendré plusieurs polémiques parmi les commentateurs modernes. Ces documents permettent pourtant de commencer à mieux saisir les principes pneumatologiques qui sont à l’origine d’un certain nombre de pratiques anciennes non élucidées, concernant l’usage de l’imposition des mains associée au don de l’Esprit dans l’initiation, les ordinations, et la réconciliation des séparés et des pénitents, laïcs et clercs. Les communautés chrétiennes ont opéré un discernement au cours des deux premiers siècles de leur histoire. Une véritable théologie de l’observation est à l’origine de ce discernement concernant la possession ou la vacance de l’Esprit chez un croyant. À l’origine, on n’impose pas la main à celui qui est déjà en possession de l’Esprit, mais seulement à celui qui l’a perdu ou qui ne l’aurait pas encore reçu. Cette pneumatologie a continué de fonctionner après la fixation des rites dans les liturgies de l’initiation et des ordinations. L’imposition des mains postbaptismale effectuée sur les néophytes avait la même finalité que celle effectuée sur les clercs dans les ordinations ; elles ont une origine commune : l’épiclèse associée à ces impositions des mains demandait à Dieu de donner son Esprit au néophyte ou à l’ordinand au cas où ceux-ci ne l’auraient pas reçu. En vertu de cette pneumatologie, ces impositions des mains étaient réitérées dans la réconciliation des laïcs (d’origine catholique ou séparée), et tout autant dans la réconciliation des clercs (d’origine catholique ou séparée) quand ceux-ci étaient reçus dans leur rang : soit parce que ces deux catégories de pénitents, laïcs et clercs, avaient perdu l’Esprit (cas des pénitents d’origine catholique) ; soit parce qu’elles ne l’avaient encore jamais reçu (cas des séparés). Ce chapitre expose aussi plus précisément les modalités d’application des règles pénitentielles à l’égard des clercs faillis, ou d’origine séparée, réconciliés dans leur rang moyennant une dispense exceptionnelle. Il montre en outre la continuité du rituel à l’égard des Novatiens durant toute la période patristique.
Abstract
Les documents produits par la querelle baptismale africaine du IIIe siècle constituent les premiers témoins des rites effectués dans la réconciliation des hérétiques et des pénitents en Occident. Ils sont aussi à la base des débats sur le sens du rituel depuis le XVIe siècle. Parmi ces documents, le De rebaptismate, ouvrage anonyme méconnu, dont il convient de questionner l’origine, la datation, et la visée. Deux traditions en concurrence sur le sol africain ont provoqué la querelle baptismale. L’hypothèse d’une christianisation de l’Africa romana par deux foyers de diffusion distincts : l’un à l’ouest (Tingitane-Césarienne), en lien étroit avec la Bétique, l’autre à l’est (Proconsulaire-Numidie), explique l’existence de ces deux traditions en Afrique, qui finissent par se confronter l’une à l’autre au milieu du IIIe siècle. C’est un concile de Numidie qui est le premier témoin des tensions survenues entre les tenants de ces deux traditions, et qui déclenche la controverse officielle. Le De rebaptismate apparaît comme une apologie que l’auteur adresse à son propre camp, alors que celui-là se divise par la défection de plusieurs évêques maurétaniens séduits par la coutume anabaptiste en usage en Numidie.